Longtemps accusée d’être l’une des industries les plus polluantes du monde, la mode est aujourd’hui en pleine mue. Éco-conception, matériaux innovants, circularité : les initiatives se multiplient pour réinventer la manière de produire, de consommer et de désirer les vêtements. Mais au-delà de son propre secteur, la mode pourrait-elle inspirer d’autres industries, comme l’automobile ou le design industriel ?
De l’ultra-fast à l’ultra-slow : la révolution silencieuse
Des marques comme Stella McCartney, Pangaia ou encore Patagonia ont ouvert la voie d’une mode plus responsable, misant sur le recyclage, le bio-sourcé ou encore le zéro déchet. Les grands groupes suivent (lentement) : Kering a son fonds innovation durable, LVMH développe des alternatives à la teinture chimique. En parallèle, des initiatives locales, des labels émergents et des créateurs indépendants expérimentent à échelle réduite de nouveaux modèles de production : slow fashion, précommande, vêtements modulables ou réparables.
Ce que la mode apprend au monde
La mode, par essence éphémère, a su intégrer les codes du désir tout en amorçant une transition. Elle montre qu’il est possible de conjuguer storytelling, expérimentation et design dans une logique circulaire. Elle transforme les contraintes écologiques en moteurs de créativité. La généralisation de l’upcycling, la multiplication des collaborations artistes / scientifiques, ou encore les défilés augmentés (digitaux, immersifs, voire holographiques) sont autant d’indicateurs d’un tournant culturel. La mode devient un espace d’expérimentation radicale sur les matières, les formes, mais aussi les récits.
Vers une haute couture industrielle ?
Et si l’automobile de demain se pensait comme une pièce de collection ? Des objets techniques façonnés comme des silhouettes, à la croisée du beau, du fonctionnel et du soutenable. L’idée de véhicules comme « pièces uniques » ne relève plus uniquement du fantasme de collectionneur. On voit émerger des logiques de customisation profonde, de finition artisanale, de narration esthétique autour de l’objet technique. Le vêtement, parce qu’il est proche du corps, inspire un rapport plus intime à la technique – et ce rapport est en train de contaminer d’autres secteurs.
La mode est un laboratoire créatif. Elle fait dialoguer tendances et sciences, artistes et ingénieurs, luxe et sobriété. C’est un précipité des tensions du monde contemporain. En ce sens, elle est un miroir et un terrain d’expérimentation dont d’autres secteurs – mobilité en tête – peuvent s’inspirer pour accélérer leur propre mutation. Sa plus grande force n’est peut-être pas d’avoir trouvé des solutions définitives, mais d’avoir ouvert une voie sensible pour penser autrement notre rapport à l’objet, à la technique et au temps.