« Réparer, c’est révolutionnaire » : pourquoi la durabilité est la nouvelle tendance tech

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Et si la technologie la plus audacieuse n’était pas celle qui crée, mais bien celle qui prolonge ?

Dans un monde saturé d’objets jetables et d’innovations programmées pour s’auto-effacer, une autre voie émerge : celle du « repairisme ». En effet, derrière ce néologisme militant se dessine un mouvement profond, culturel autant qu’économique, qui réhabilite le geste de la réparation non seulement comme acte pratique, mais aussi comme réponse politique à la surconsommation. Ainsi, bienvenue dans une révolution silencieuse, mais pourtant radicale : la réparation durable.

Le repairisme : philosophie du contre-pied et de la réparation durable

Réparer, c’est résister. Résister à la vitesse, à la nouveauté obligatoire, et à la déconnexion entre usage et fabrication. Le mouvement repairiste ne se contente pas de prolonger la durée de vie des objets : au contraire, il remet en cause l’ensemble du système linéaire, celui qui va de l’extraction à la décharge. En d’autres termes, il affirme que la technologie peut être durable, démontable et transmissible.

Ce mouvement se matérialise concrètement dans les Repair Cafés (près de 3 000 dans le monde), dans les hackerspaces et les fablabs, dans les tutoriels de réparation libre, ainsi que dans la montée en puissance d’une économie circulaire. On y découvre une nouvelle forme de technophilie : plus artisanale, plus communautaire, et surtout, plus sensée. Un phénomène sur lequel Supercritic se penche.

Une économie de la réparation durable : du bricolage au modèle économique

Ce qui relevait encore il y a peu du do-it-yourself s’institutionnalise. Aujourd’hui, des plateformes comme Back Market, Murfy ou encore Spareka construisent des modèles de reconditionnement, de pièces détachées et d’assistance à la réparation. Parallèlement, des collectivités ouvrent des « ressourceries » et des « ateliers de réparation partagés ».

En parallèle également, la pression citoyenne mais aussi législative pousse les grandes entreprises à rendre leurs produits réparables. Par exemple, l’indice de réparabilité est désormais obligatoire en France pour les smartphones, ordinateurs, lave-linge, etc. Apple et Samsung proposent des kits de réparation à domicile, tandis que Framework mise sur des ordinateurs portables modulables. Autrement dit, ce n’est plus un geste marginal : c’est un futur de marché.

Politique du tournevis : réparer, c’est réparer le monde

Ce mouvement est aussi profondément politique. Il raconte un rapport au monde : celui du soin plutôt que de la conquête, de l’économie d’usage plutôt que de l’obsolescence. Réparer, c’est ralentir, observer, comprendre. C’est revaloriser les savoir-faire manuels, les gestes anciens, ainsi que les circuits courts.

Dans une société hyperconnectée, réapprendre à ouvrir un appareil, à diagnostiquer une panne, à changer une pièce — c’est, en réalité, se réapproprier une forme de souveraineté technologique. C’est retrouver un lien entre utilisateur et objet, entre matière et valeur. Finalement, c’est inventer une économie de la préservation face à l’économie de la destruction.

Le repairisme est plus qu’un mouvement écologique ou économique : il représente aussi une esthétique du temps long. Il ne nie pas le progrès, bien au contraire : il l’inscrit dans une autre temporalité. Une temporalité dans laquelle les objets ne sont pas simplement consommés, mais bien accompagnés. Réparer, c’est prolonger la vie. C’est prolonger l’attention. Et dans ce geste minuscule, il y a peut-être le début d’une vraie révolution.

Publié le 27 mars 2025 et mis à jour le 21 avril 2025.

Publié le 27 mars 2025.

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